"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mardi 9 juin 2015

Niko Pafras: la vraie religion de l'Occident




Je ne suis ni journaliste professionnel, ni expert en affaires internationales. Heureusement, on n'a pas besoin d'être l'un ou l'autre pour voir ce qui se passe dans les médias occidentaux populaires ces jours-ci. 

Vivant en Amérique, je suis bombardé sur une base quotidienne avec les opinions "d'experts" sur la crise ukrainienne, par une horde d'analystes des nouvelles du soir. Le thème récurrent dans ces entretiens, indépendamment de leur affiliation politique ou du réseau de nouvelles, est l'indignation ressentie par les dirigeants occidentaux envers "l'agression" faite par la Russie en Ukraine. 

Idéalement, l'agression du président Porochenko envers ses concitoyens dans l'est de l'Ukraine par l'intermédiaire du bataillon ouvertement néo-nazi Azov et de ses semblables, reste presque entièrement non déclarée. Quoi qu'il en soit, il faut se demander, ce qui est précisément dans la psyché des dirigeants occidentaux et des experts qui les rend fous furieux, bave à la bouche d'indignation face à la crise en Ukraine, mais qui leur fait fermer les yeux quand il advient des incidents similaires qui sont menés par les pays occidentaux ou leurs alliés?

Par exemple, le 20 Juillet 1974, la Turquie, membre de l'OTAN sous la direction du Premier ministre Bülent Ecevit a lancé l'invasion de Chypre connue sous le nom d'Opération Attila. Quelle raison M. Ecevit a-t-il donné pour cette agression  et cette violation flagrantes des normes internationales? La prévention de "l'Enosis", c'est-à-dire de l'union avec la Grèce continentale, et la protection de la minorité turque de prétendus pogroms par les Grecs dont la population, à l'époque, représentait environ 77% de l'île. 

Le résultat de l'invasion fut la division de Chypre en République de Chypre internationalement reconnue, et la soi-disant RTCN ou République turque de Chypre du Nord qui est reconnue seulement par la Turquie. Sur le papier, la RTCN est considéré par la Turquie comme un Etat séparé, mais en réalité, la RTCN est de facto une partie de la Turquie. En d'autres termes, une annexion. 

Maintenant on pouvait s'attendre, toutes choses étant égales par ailleurs, qu'une indignation similaire ait été montrée à la Turquie pour son invasion illégale et l'occupation ultérieure du nord de Chypre. Malheureusement, nous vivons dans un monde où les choses ne sont pas égales. La réponse de l'Ouest? Négligeable au mieux. 

Il n'y eut aucun châtiment américain de la Turquie, ni de lourdes sanctions. Pas de renforcement militaire des forces américaines à la frontière turque ou de comble de l'opprobre dans les médias occidentaux. Et curieusement, il n'y eut aucune comparaison entre Hitler et Ecevit, faite sur une base quotidienne, comme elle a été omniprésente dans toute la presse occidentale depuis la réunification de Crimée avec la Russie. Non, au contraire, la Turquie a cimenté ses liens avec l'Amérique et l'Europe, et elle continue à recevoir des milliards de dollars d'aide militaire de par la doctrine Truman.

Contrairement à la violente invasion de Chypre par la Turquie, qui a coûté la vie à des milliers d'hommes, la Crimée a été reçue en Russie par un référendum libre et équitable, au cours duquel une écrasante majorité des habitants de Crimée a choisi l'unification avec la Russie. La réponse américaine à l'invasion turque fut le silence. Pourtant, quand on en vient à la population de la Crimée qui exerce ses droits démocratiques et son droit à l'autodétermination, que l'Amérique considère comme droit universel, la réponse est l'indignation, les sanctions et les menaces.

    
  
Comment pouvons-nous expliquer cette réponse, ou plutôt, l'absence de celle-ci? Les intérêts. C'est clair et simple. 

La Turquie est membre de l'OTAN dont l'emplacement stratégique est vital pour l'OTAN (id est l'Amérique) et ses opérations au Moyen-Orient, au Caucase et dans la région de la mer noire. L'invasion turque et la réponse américaine m'ont conduit à une seule conclusion raisonnable. L'indignation américaine pour l'annexion de la Crimée n'est pas réelle. Elle est entièrement "fabriquée" à des fins politiques dans le but de poursuivre leur grand projet d'expansion vers l'est de l'OTAN malgré les promesses donnée à la Russie dans les années 90, que cette expansion ne se produirait pas. 

Considérant tout cela, je ne pouvais pas m'empêcher de penser aux propres documents fondateurs de l'Amérique. Plus précisément, la Déclaration d'Indépendance qui stipule dans son premier paragraphe "Lorsque dans le cours des événements humains, il devient nécessaire pour un peuple de dissoudre les liens politiques qui l’ont attaché à un autre et de prendre, parmi les puissances de la Terre, la place séparée et égale à laquelle les lois de la nature et du Dieu de la nature lui donnent droit, le respect dû à l’opinion de l’humanité oblige à déclarer les causes qui le déterminent à la séparation.Je suppose que le droit à l'autodétermination n'est pas universel après tout.

Mais le grand thème ici, est l'opposition occidentale aux pays orthodoxes qui détiennent des valeurs chrétiennes traditionnelles. À bien des égards le monde orthodoxe est une épine dans leur chair. Cela frustre l'Occident parce que le monde orthodoxe, dans une large mesure, jamais rien eu comme les prétendues "Lumières" qui ont commencé le processus de sécularisation et de déchristianisation de l'Occident que le XVIIIe siècle a connu. 

L'idée d'une nation forte et robuste qui tient aux valeurs chrétiennes traditionnelles est une idée que l'Europe occidentale trouve répugnante à l'extrême. Pourquoi? Parce qu'une telle nation serait un rival idéologique et c'est quelque chose que l'ordre actuel ne peut pas tolérer. 

Les pays occidentaux ont "mondialisé" leurs valeurs laïques en les qualifiant de "droits de l'homme" et à l'aide des organisations de défense des droits humains comme une trique pour intimider, mener à la soumission, ces nations qui détiennent des valeurs traditionnelles. Mais bien sûr, cela ne concerne que les pays traditionnels qui ne remorquent pas la ligne de l'agenda occidental. 

Si vous êtes un pays comme la Turquie, un pays qui a de multiples violations des droits de l'homme, vous obtenez un laissez-passer gratuit parce que vous avez acquiescé au programme d'hégémonie occidentale. C'est la raison pour laquelle l'Amérique et les pays d'Europe occidentale sont pour la plupart silencieux sur la question des violations des droits humains par des pays comme l'Arabie saoudite et la Turquie. 

Mais pour les pays orthodoxes comme la Russie et la Serbie, on ne passe rien et le châtiment abonde. Comme un de mes amis le dit, le libéralisme des lumières est la vraie religion de l'Occident et ceux qui refusent de se convertir ne peuvent espérer aucun quartier.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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